Achtung Baby
C’est l’histoire de quatre Irlandais, devenus stars internationales, fiers représentants d’un rock épique, aux hymnes imparables et aux concerts devenus les grandes messes d’un public en mal de révolutions feutrées. A la fin des années 80, à leur apogée, sans doute fatigués d’être devenus des icônes un brin caricaturale, les voilà décidés à tout changer. A repenser leur image et leur musique. Fou ? Certainement. C’est à ce prix qu’ils donneront naissance à leur plus grande réussite créative : Achtung Baby.
La genèse est bien connue. Départ pour Berlin et le Hansa Studio, lieu emblématique du Heroes de David Bowie. A la production Brian Eno et Daniel Lanois et à la console un petit nouveau aux mains d’or, Flood. La panne sèche, des sessions où tout le monde tire la gueule et puis soudain, l’instant de grâce, celui qui définit exactement le processus créatif de U2 et qui apparaît pour la toute première dans le documentaire From The Sky Down. D’un rien, d’un simple riff de guitare, extrait d’un autre morceau, le groupe, suivant à la lettre les instructions de Bono sort une de ses plus grandes chansons : One.
Are you ready for the push ? La suite est de la littérature. Un single surgi de nulle part, The Fly, où le chanteur a troqué son drapeau blanc et ses cuissardes pour un ensemble en cuir, des lunettes noires lui masquant la moitié du visage, une teinture noire et l’envie impérieuse d’être enfin pris au sérieux. En douze morceaux, U2 révolutionne le son qui a fait son succès. Plus question de monter sur des barricades où de vouloir changer le monde. Les Irlandais ont pris le pouls de la nouvelle génération, où les jeunes se s’enthousiasment plus pour le futur et où l’on a peur de baiser par crainte du Sida. U2, dans son album le plus sombre, répond par des déclarations et des interrogations sur l’amour. Les sentiments, le sexe – un thème nouveau pour le groupe -, l’abandon, la passion. Derrière ses grands artifices, Achtung Baby ne parle que de cela, que d’un amour désiré, oublié, déçu et retrouvé.
Si The Joshua Tree a été l’achèvement d’une époque, Achtung Baby est celui qui portera la suivante. Les hymnes du premier permettent de soulever les foules et la puissance sonore et visuelle du second offre d’insuffler un esprit rock aux concerts autrefois plus sages et polissés. A l’exception notable d’Acrobat, tous les morceaux de l’album ont été joués en live lors des deux dernières décennies. C’est même Achtung Baby qui a été mis à l’honneur lors de la prestation du groupe au festival de Glastonbury en 2011. La sortie d’un coffret Über Deluxe/Über onéreux méritait bien une promo digne de ce nom. Seul titre oublié depuis les 90’s, Love Is Blindness. A l’exception d’une réapparition aussi surprenante que touchante, le morceau n’a jamais été rejoué depuis la fin du Zoo TV Tour. Conclusion formidable d’un album déroutant, Love Is Blindness symbolise peut-être trop son époque, et la fin pathétique de MacPhisto, double démoniaque de Bono.
Le U2 de cette époque a su se réinventer. Il s’est même offert une véritable vie de rock star, au moins en apparence. The Edge s’est recasé, Larry a joué de la batterie et Bono s’est beaucoup amusé dans des limousines. Seul Adam Clayton a réellement touché du doigt les plaisirs faciles du star system. En s’envoyant la divine Naomi Campbell, en devenant une loque alcoolique et droguée et en ratant un concert pour cause d’effondrement total. Rock and roll, that’s all folks !
A propos de cet album
Septième album studio de U2.
Sorti le 18 novembre 1991.Réédition le 30 octobre 2011.
Enregistré en 1990 et 1991 à Berlin (Hansa Studios) et Dublin (Windmill Lane studios, STS Studios).
Produit par Brian Eno et Daniel Lanois.
Singles :
- The Fly
- Mysterious Ways
- One
- Even Better Than The Real Thing
- Who's Gonna Ride Your Wild Horses
Tournée :
Zoo TV Tour 1992/1993 (157 concerts).
Ouverture le 29 février 1992 à Lakeland (Floride, USA). Clôture le 10 décembre 1993 à Tokyo (Japon).
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