Cette année ce sont les vingt ans de Zooropa. Au départ U2 ne devait sortir qu’un EP de quatre à cinq titres dans la lignée d’Achtung Baby, mais Zooropa est finalement devenu un album à part entière salué par la critique. L’histoire partait donc en sa faveur, pourtant cet album est presque enterré par ses créateurs.
Vorsprung durch Technik
Inscrit dans la continuité des expérimentations commencées avec l’album Achtung Baby, Zooropa est plus que ce dernier un album de rock alternatif et de musique électronique. L’album s’ouvre sur ce qui reste à ce jour l’une des meilleures intro d’album de U2, celle du titre éponyme Zooropa. Le son plonge aussitôt l’auditoire dans un territoire qui ne lui était pas familier pour un album de U2 durant les années 80′ : celui des samples et du climat industriel, alliant à la fois énergie et douceur. Loin de l’entrée fracassante d’Achtung Baby à vocation de troubler ses fans, c’est ici une entrée progressive que propose U2 pour nous amener dans ce lieu qu’est Zooropa, un endroit inventé par Bono pour retranscrire une vision imaginaire de ce que pourrait devenir l’Europe après les multiples changements que le continent a connu au cours des dernières années (chute du mur de Berlin, guerre de Bosnie-Herzégovine, Union Européenne qui s’agrandit etc.).
L’album alterne entre des morceaux relativement conventionnels (The First Time, Stay et Dirty Day) et des titres surprenants tels que Numb, Lemon ou encore The Wandered. Numb, ce titre chanté par The Edge qui déroute par ses sonorités et ses couplets monotones, est l’illustration même du rock industriel et de la volonté de U2 de prendre de court le public en faisant de ce titre le premier single de Zooropa. La surprise est également de taille devant la chanson qui clôture l’album : à nouveau Bono n’en est pas le chanteur – inutile de vous de préciser qu’il s’agit de Johnny Cash – et la chanson est pour le moins en décalage avec le reste de l’album. Signe à nouveau de la volonté et de l’audace de U2 à étonner, quitte à déplaire aux fans qui peinent à apprécier cet album à cause de ces chansons trop éloignées d’un registre « standard ».
Dans l’ombre d’un monstre
Il n’est pas facile pour un album de trouver sa place après un « monstre » comme l’a été Achtung Baby, le seul album de U2 qui a rivalisé avec The Joshua Tree en terme d’exemplaires vendus (18 millions d’exemplaires vendus pour le bébé, contre 7 millions pour Zooropa). C’est d’autant plus difficile si l’album ne bénéficie pas d’une tournée qui lui est proprement dédiée. Du fait de sa sortie durant la tournée promotionnelle d’Achtung Baby, Zooropa a été un album greffé au Zoo Tv Tour sans que la tournée connaisse de changements majeurs. Même après la sortie de Zooropa, le Zoo Tv Tour est resté la tournée d’Achtung Baby. Les chansons de Zooropa en elles-mêmes ont été ce changement quasi-imposé dans les setlists d’une tournée qui dure depuis près de deux ans.
Les titres de Zooropa n’ont été joués sur scène qu’à partir de juillet 1993, c’est-à-dire pour les deux derniers legs, soit une trentaine de dates sur les 156 concerts que comptait le Zoo Tv Tour. Durant ces concerts quatre à cinq titres étaient joués mais seuls Numb et Stay se sont vus attribuer une place régulière dans les setlists. Zooropa et Babyface les ont ponctuellement accompagné dans le premier de ces legs, puis Daddy’s Gonna Pay, Lemon et Dirty Day trouvèrent une place dans l’ultime leg de la tournée.
Parmi ces concerts aucun n’eut lieu aux USA, or on sait à quel point le public outre-atlantique compose une bonne part du public – et donc d’acheteurs d’albums – de U2. Peu de représentations des chansons et aucun concert en Amérique, autant dire que la promotion à sa juste valeur de Zooropa en live a été plus que limitée.
Plus limité encore, la pérennité des chansons de Zooropa en concert. A la tournée suivante, le PopMart Tour, aucun titre de Zooropa ne fut joué. Par la suite seul Stay tira son épingle du jeu pendant l‘Elevation Tour en étant joué dans la moitié des concerts. S’en suivi une dégringolade au Vertigo Tour où The First Time fut l’unique façon de rappeler l’existence de chansons de Zooropa en live le temps de six concerts. En 2009 Stay refait surface de temps à autre avec la tournée U2360°, avant la résurrection de Zooropa sur scène à chaque concert en 2011. Serait-ce le retour en grâce de l’album Zooropa en concert ? Probablement pas, la présence du titre éponyme a essentiellement servi à varier les setlists d’une tournée longue tout en créant une surprise dans un show qui commençait à se figer.
Passage à la trappe
A l’automne 2011 Achtung Baby bénéficiait d’une ressortie. Au milieu du prix exorbitant de l’Uber Edition Deluxe, du documentaire ‘From The Sky Down‘ et du CD de reprises Achtung Truc Covered, une toute autre chose est presque passée inaperçue : Zooropa figure sur certaines des éditions en guise de CD bonus. U2 a relégué son propre album au rang de bonus… c’est dire toute la considération que le groupe semble porter à Zooropa. La présence de Zooropa sur cette réédition rend peu envisageable l’hypothèse de sa ressortie prochaine.
Vingt ans après sa sortie, ça sent le roussi pour Zooropa. Aucune réédition en vue dans la lignée des autres albums, quasiment aucun titre joué en concert… Bénissez le ‘Zoo Tv live from Sydney’, il se pourrait bien que ce soit l’unique façon dont nous pourrons nous rappeler que Zooropa est bel et bien un album de U2 qui a existé.
Discussions
9 commentaires ont été publiés pour cet article.
RIP mister lou reed
Satellite’s gone
Up to the sky
Things like that drive me
Out of my mind
I watched it for a little while
zooropa n’est pas leur meilleur album mais c’est celui ou a soufflé le plus fort un vent de creativité et de liberté
le titre zooropa est un chef d »oeuvre the wanderer une grande chanson
d »ailleurs la version live en 2005 en hommage a johnny cash est magnifique
maintenant ils sont a la croisée des chemins
vont ils finir leur carriere en sortant de bons albums mais sans prendre aucun risque
ou simplement composer librement au risque de perdre quelques fans
le prochain album va etre instructif
D’autant qu’ils ne l’ont que très rarement trouvé ! ;-)
Zooropa est l’album de U2 que je préfère. Je ne dis pas que c’est objectivement le meilleur, mais j’adore la prise de risque et l’inventivité de cet album. Et plus encore, j’aime le fait que c’est album est quasi exclusivement constitué d’OVNI (Zooropa, Lemon, Daddy’s, Numb, The Wanderer, etc), de chansons qui semblent sortir de nulle part. U2 a vraiment cette capacité-là, créer des OVNI. Dommage qu’il la laisse de côté pour rechercher le « hit » standard qui passe à la radio.
Achtung – Zoo – Pop
La triptyque magique de U2.
Selon moi la meilleure des periodes et de tres loin.
Tout a fait d’accord, cet album n’est pas reconnu a sa juste valeur.
Pascal, Bert et Fab se rappelleront peut être a quel point je les ai saoulé a l’époque et après avec mon amour pour cet album :D
Oui il y a de quoi se révolter.
Sortir Numb comme premier single en version Vhs… ça a noyé l’album
Qu’on aime ou qu’on n’aime pas numb c’est vraiment une grosse connerie.
Zooropa a deux super singles avec Stay qui était dans la continuité d’Until The End of The world (Wim wenders)
Musiques de films y a pas à dire ils savent faire.
et Lemon, citron superstar du popmart
The first time et the wanderer se détachent clairement des autres chansons prisunic de l’album mais avaient-elles réellement leurs places sur Zooropa
Zooropa était un album fait et sortit en pleine tournée. Un album de fans pour les fans c’était l’idéal et permettait au groupe de rallonger Zoo TV. U2 s’était engagé à le refaire en 360 mais ils n’avaient rien de décent a presenter … Quant à la remasterisation de Zooropa c’ est mort
.
Je plussoies dans les grandes largeurs. Je me souviens de ce 5 juillet 1993: quel choc en découvrant cet album !!! Voilà le U2 que j’aime: audacieux, courageux, inventif, décalé. J’exacte opposé de ce qu’ils sont devenu ensuite. Le traitement infligé à Zooropa me scandalise et je trouve désolant de ne pas le ressortir pour ses 20 ans. Sa seule présence en bonus de la ressorti d’Achtung Baby fut d’ailleurs révélatrice, en ce sens. Comme dit dans cet article.
Ajouter une réaction