Alors que dans quelques heures la tournée la plus attendue de ces 10 dernières années va commencer, alors que jamais auparavant des stades, aux quatre coins du monde, ne s’étaient remplis à une vitesse aussi folle, quatre copains de collège, une nouvelle fois seuls face à leur destin, agencent, répètent et peaufinent leur cérémonie. Car U2 c’est d’abord l’histoire d’un groupe unique, incomparable en live, quatre musiciens capables de transcender un album studio pour le livrer avec toute sa démesure à son public passionné. Et même s’il est impossible de percer tous les secrets de l’alchimie rock de U2, nous pouvons parfois en saisir quelques ingrédients…
Une des clés de leur succès repose bien en leur capacité à rendre live des titres qui semblaient parfois impossibles à jouer devant un public. Aussi, à travers les premières les premières versions en concert des titres du dernier album, nous allons tenter de percer quelques uns de ces secrets : comment U2 parvient-il à reproduire des titres parfois arrangés, modifiés, réenregistrés des dizaines de fois en studio ? Comment nos quatre irlandais arrivent-ils à porter à leur sommet certaines de leurs compositions en live, alors que de l’aveu même des membres cela paraissait fort impossible lors des sessions studio… ?
Le son live de U2 est donc d’abord lié à la qualité de ses musiciens que l’on ne présente plus.
Larry Mullen Junior et Adam Clayton forment probablement une des rythmiques les plus efficaces de l’histoire du rock. Les rythmes de Larry, remplissent un espace énorme, tout en s’effaçant habilement derrière la voix de Bono à la moindre de ses intonations (Larry avouant ne pouvoir jouer qu’avec sa voix présente). Adam Clayton opte pour un son de basse épais et précis pouvant se coupler avec la grosse caisse et les graves de Larry, complément indispensable au jeu tout en aiguë et en échos de The Edge. N’oublions pas qu’Adam est également un grand mélodiste, à la base de titres comme Bullet the blue sky, Gloria, New year’s day… Ajoutons à ceci le pouvoir créatif de The Edge, qui assure n’avoir pas imaginé à l’origine que sa guitare prenne une telle dimension et une telle puissance en live -les échos et « delays » multipliés prennent la place de 10 synthétiseurs ou de plusieurs guitares aux harmonies parfaites- complétés magistralement par sa voix de cristal.
Enfin Bono, en véritable maître de cérémonie, est capable de chanter une même chanson de dix façons différentes à la suite (d’où l’absence de monotonie sur les bootlegs de U2…), ou d’improviser quand bon lui semble dès que son instinct génial le rattrape…Et quand tout cela ne se suffit plus, U2 intègre de multiples samples, déjà de plus en plus présents dès le Joshua tree tour, pour ne plus quitter le groupe jusqu’à aujourd’hui. Ce sont très souvent des notes et arpèges de synthétiseurs très aiguës eux aussi, se combinant à merveille avec les notes de The Edge.
Vertigo :
Il faut toujours se méfier des effets d’annonce de Bono, grand communicateur, toujours prêt à allécher son public et les médias, mais cette fois ci tout était vrai : Vertigo a bien été écrit comme un premier single. Les premières versions live proposées en font déjà un morceau d’ouverture parfait : simple, direct, chantant, très proche de la version studio car joué très live lors des sessions d’enregistrement de l’album, (Steve Lillywhite étant passé par là…). Comme sur Boy U2 a ici composé ce titre d’abord à quatre, laissant l’esprit rock cher à Larry opérer. Démarche différente de ce que U2 produit désormais en travaillant (trop ?) les effets, la production, laissant parfois tout instrument au placard avant le mixage…
Pas de grande surprise sur Vertigo en live, là n’est pas son objectif, sa fougue va s’abattre sur le public, Bono se chargeant d’appuyer plus que sur l’album les « un, dos, tres… » et autres « ola » pour survolter son public. C’est un titre parfait pour chauffer la voix de Bono, d’autant plus que The Edge le doublera sur certaines parties.
La principale trouvaille de Bono, certainement supprimée lors du mixage studio, est le prolongement de la phrase « Check it – Shots fall- She’ll make it in yeah » sur le début des accords de The Edge et de la partie instrumentale. Excellent effet live qui aurait pu figurer sur le single. C’est justement ces ajouts de voix multiples qui donnent toute la dynamique live des titres de U2.
All because of you :
Ce titre de début de concert est résolument live. Néanmoins tout se complique par les ajouts de samples, dont cette note de guitare aiguë à l’extrême en ouverture de morceau. Il semblerait au vu du Brooklyn Bridge que le groupe n’ait pas encore trouvé toute la mesure live de All because of you. Il est fort probable que les guitares seront doublées par des bandes ou par Bono lui-même, bien que le début de concert devrait lui laisser les mains libres.
Morceau influencé par les Ramones, certainement très rock et très « sale » à son origine il a forcément été modifié et lissé par le passage de Flood et des multiples productions. Si bien qu’en live ce titre devrait retrouver son urgence, son esprit à la limite de l’accrochage qui n’est pas pour déplaire à The Edge.
Bono s’en donne déjà à cœur joie après le second couplet où avec un parlé haché et rythmé il peut prononcer le nom de la ville où le concert se déroule, ici « the other side of Brooklyn Brigde », avant de laisser Edge torturer à souhait son solo digne des plus grandes heures du rock and roll… On peut déjà être sûr que Bono incitera tout le public à frapper dans ses mains sur une grande partie du morceau et surtout sur les parties solos de The Edge.
Miracle Drug :
Morceau de bravoure, sommet incontestable du nouvel album, certainement un des grands moments des live à venir, d’autant plus que les versions du Brooklyn Bridge ou de CD UK sont déjà presque parfaites. Première remarque, pour calmer l’intensité du début de concert qui partira comme en 2001 très vite et très fort, The Edge devrait commencer les arpèges de guitare seul avec en fond des notes de synthé très aiguës et discrètes si chères à Brian Eno. Bono pourra alors laisser le message qu’il souhaite en parlant et s’adressant au public comme lors du concert de New York. Sa capacité d’improvisation devrait encore être remarquable, Bono étant certainement le seul chanteur capable de s’adresser autant à son public en ne répétant pas chaque soir les mêmes choses. Puis le groupe doit marquer un temps d’arrêt pour lancer vraiment le morceau, The Edge recalant les bandes et les samples avec une touche à son pied. Moment de vide qui à coup sûr disparaîtra au fur et à mesure des concerts. Ensuite la magie opère comme sur l’album. Le morceau commencé, le groupe ne peut plus dévier au risque de se décaler avec les synthés (ce qui explique parfois certains dérapages heureux, sur des titres comme With or wihtout you, lorsque Bono se perd dans ses improvisations en fin de chanson…).
On remarque que la batterie de Larry est plus présente avec son tambourin en avant. Ensuite tout le morceau doit entraîner la « cassure » du milieu où Bono incitera le public à chanter les « yeah, oh… » ce qui lui permettra de parler dessus avant de laisser Edge plaquer ses accords de ré si puissants et de chanter son couplet avec sa voix brillante : frissons assurés. Comme pour Seconds à une autre époque, une large partie du public découvrira la voix incroyable de The Edge bien meilleure que la quasi totalité des chanteurs actuels et passés.
Sometimes you can’t make it in your own :
Morceau tout en émotions, dédié par Bono à son père, un hommage qui fera le tour du monde… U2 a réussi avec ce titre ce qu’il n’avait pas conclu avec Stuck in a moment : un titre abouti, émotionnellement puissant et évolutif.
Sometimes va également convaincre encore plus que Kite, son intensité live prend déjà toute sa dimension. Sommet annoncé en fin de morceau avec le couplet “can you hear me when i sing, you’re the reason i sing…” et son envolée musicale, le public de New York, cela s’entend clairement, ne peut s’empêcher de crier emporté par la puissante basse d’Adam à ce moment. Pour le reste les voix seront parfaites, aussi belles qu’en studio, là encore c’est le pouvoir de U2 en live…
City of blinding lights :
Il est des morceaux déjà très forts sur album que U2 transcende de façon inégalable sur scène, comme Walk on par exemple. Nous pouvons déjà prendre les paris qu’une très large partie du public se précipitera sur l’album afin de réécouter ce titre après l’avoir entendu en live…
Tout commence par la batterie de Larry, un rythme puissant et dansant, proche de l’esprit de Where the streets have no name, beaucoup plus en avant sur les premières versions live que sur l’album. Alors Adam toujours impeccable place son épaisse basse pour combler les espaces et le morceau est lancé. La difficulté pour The Edge est de rendre l’esprit studio de la mélodie car plusieurs guitares sont superposées, avec pour couronner le tout un piano magistralement simple. Edge semble encore gêné par sa guitare qui n’est pas doublée, on peut être sûr que le groupe a beaucoup répété ce titre lors des dernières sessions. La multiplication des échos semble être la solution trouvée par U2.
Mention spéciale à Adam et Larry survoltés sur ce titre, véritable rouleau compresseur portant les voix exceptionnelles de Bono et The Edge, qui se combinent à des hauteurs si dangereuses pour les autres chanteurs… Déjà un must, et dire que de soir en soir tout cela va atteindre des sommets encore in estimés…
Original of the species :
Dernier morceau de HTDAAB que nous pouvons juger sur ses premières versions live. L’aspect acoustique sera privilégié : piano-voix en avant. Le miracle live de U2 opère encore, alors que sur la version studio les synthés superposent leurs mélodies avec les guitares, U2 se permet de rendre ce titre tout aussi puissant avec pour mélodie le seul piano. De nombreux titres ont déjà connu un tel succès live avec plus de simplicité (Stay, Desire…), tout simplement parce que Bono devient alors magistral, le groupe s’efface véritablement pour laisser ses mélodies vocales prendre le dessus…
Nous pouvons remarquer que ce titre avec quelques autres comme Sometimes, Kite, Bullet the blue sky ou Untill the end of the world (très souvent joué live) sont importants pour Bono car ils permettent à sa voix de se reposer et de chanter dans des tonalités plus graves. Le danger étant de l’user sur des titres devenus presque impossibles comme New Year’s day, de la période War ou Unforgettable fire… Une opération des cordes vocales étant malheureusement passée par là.
Reste à attendre les premiers concerts et à voir comment ces titres vont évoluer, car de soir en soir ils prendront toute leur dimension, et après quelques semaines où quelques mois, les trouvailles de Bono bonifieront les versions, rien n’étant jamais figé avec U2. La monotonie est bannie de leur répertoire live.
Nous pouvons attendre aussi certainement le retour de titres tels que Electric Co, 40 ou encore 11 o’clock, il sera alors intéressant de voir comment ils sauront les interpréter après la perfection passée. Morceaux qui raviront les fans et garniront le futur DVD de titres différents de ces dernières années.
A suivre…
Discussions
6 commentaires ont été publiés pour cet article.
Ils étaient ds la salle les Simple???
encore un hommage aux groupe frère bravo bono .
Que jim en fasse autant pour U2
Encore un hommage aux Minds, bonne idée ils le méritent !
twickenham 2 ? non non Glasgow
c’est un copié collé !!!
Merci Fabio je viens juste de voir la réponse !
Merci mon ami FandeJim !
Superbe article de mon ami Will.
C’est normal , nous avons les même goûts musicaux.
Il a fait aussi une très belle revue des Simple Minds que je vous conseille fortement .
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